Les nouvelles bases du repérage amiante avant travaux viennent d’être fixées par le décret du 9 mai 2017, paru au Journal officiel le lendemain. Plusieurs autres décrets viendront en complément, notamment pour définir les modalités de réalisation des repérages. Cette réforme a pour but annoncé d’optimiser les coûts pour les entreprises du bâtiment et d'éviter les blocages de chantier tout en renforçant la sécurité des travailleurs.
La loi Travail dite loi El Khomri avait suscité de vives réactions, entrainant l’utilisation de l'article 49-3 de la Constitution. Le texte définitif a été publié au Journal officiel le 9 août 2016. L’un des volets de cette loi est passé largement inaperçu, mais concerne directement tous les professionnels du bâtiment et du diagnostic immobilier. Il s’agit de fixer de nouvelles bases au repérage amiante avant travaux. Ce repérage a pour but principal d’assurer la protection des salariés intervenant sur des sites potentiellement contaminés. La réglementation qui s’y rapporte est donc incorporée au code du Travail. Le décret du 9 mai 2017 entraine la modification de l’article R. 4412-97 et l’ajout de 6 articles à sa suite. Le diagnostic amiante avant travaux existait déjà avant la loi Travail mais il reposait exclusivement sur l’obligation pour le maître d'ouvrage ou le propriétaire d’évaluer les risques encourus par les professionnels devant intervenir sur le chantier. La loi Travail va beaucoup plus loin en instaurant véritablement un repérage obligatoire de l’amiante avant travaux (art. L 4412-2).
Le repérage de l’amiante avant travaux s’applique désormais à de nombreux équipements et installations :
Les immeubles bâtis
Les autres immeubles (terrains, infrastructures de transport, ouvrages de génie civil)
Les matériels roulants de transports
Les navires et autres engins flottants
Les aéronefs
Les installations utilisées pour la réalisation ou la mise en oeuvre d’une activité.
Ce repérage relève de la responsabilité du propriétaire, du donneur d’ordre ou du maître d’ouvrage.
Le repérage amiante avant travaux s’applique à toute opération entrainant un risque d’exposition à l’amiante pour les travailleurs. Il s’agit donc :
– des interventions sur des matériaux, matériels, équipements ou articles susceptibles de libérer des fibres d’amiante dans l’atmosphère
– des travaux d’encapsulage ou de retrait de matériaux, matériels, équipements ou articles contenant de l’amiante.
Les chantiers de démolition sont soumis aux mêmes critères.
Le maître d’ouvrage devra procéder à un marquage des zones amiantées avant le début du chantier.
Le repérage amiante avant travaux pourra désormais être intégré à l’opération de travaux. Cette disposition est particulièrement intéressante pour les bâtiments encore occupés. Un repérage totalement fiable n’est souvent possible que grâce à des opérations destructives. En planifiant ces opérations au fur et à mesure de la libération des lieux par les occupants et de l’avancée du chantier, le repérage ne pourra être que plus exhaustif et fiable.
L’opérateur de repérage devra pouvoir justifier de ses compétences et des moyens nécessaires à l’exercice de cette mission.
Le décret du 9 mai 2017 prévoit un certain nombre de cas pour lesquels le repérage peut ne pas être réalisé, notamment en cas d’urgence. Dans tous les cas, toutes les mesures nécessaires doivent être prises pour assurer la santé des travailleurs.
Si le repérage amiante avant travaux a fait l’objet d’une réforme, c’est que sa mise en application avait jusqu’à maintenant été très disparate. Certaines entreprises du bâtiment ont joué le jeu en respectant totalement leurs obligations en matière d’évaluation des risques. Pour d’autres, un contrôle par l’inspection du Travail a été nécessaire pour que la santé des salariés soit respectée. Cette procédure a abouti le plus souvent à un blocage du chantier. S’ensuivent des surcoûts liés aux retards et aux opérations de décontamination, ainsi que des paiements de dommages et intérêts en cas d’action en justice. La présence d’amiante détectée en cours de chantier représente 25 % des arrêts totaux. La réglementation a été globalement peu appliquée sur les petits chantiers alors que le risque pour les travailleurs est le même. L’ingestion de seulement quelques fibres au cours d’une vie suffit à déclencher des pathologies graves à retardement.
La nouvelle réglementation a donc pour principal objectif de limiter les arrêts de chantiers en agissant sur la prévention des risques et la maîtrise des coûts.
Pour veiller à l’application du nouveau repérage amiante avant travaux, les inspecteurs du travail pourront élargir leurs contrôles à tous les types de travaux et de secteurs d’activité, du moment que la santé d’un salarié est en danger. Les arrêts de chantier pourront s’appliquer à tous les travaux soumis à une obligation de repérage. Les inspecteurs pourront faire procéder à des analyses et à des mesures d’empoussièrement. Ils pourront également s’appuyer sur les conclusions des rapports de diagnostic amiante réalisés avant le chantier.
Le diagnostic amiante avant travaux devient donc crucial pour évaluer les risques et prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter un arrêt de chantier.
Le Syrta (Syndicat du retrait et du traitement de l’amiante et des autres polluants) s’est félicité de cette nouvelle réglementation qui permet à la fois de mieux protéger les salariés et d’éviter les arrêts de chantier suite à des découvertes tardives de matériaux contaminés. Les entreprises du bâtiment pourront mieux optimiser leurs coûts en anticipant les opérations de retrait ou d’encapsulage nécessaires. Ce décret représente plutôt une bonne nouvelle pour les cabinets de diagnostics immobiliers car les repérages vont devenir systématiques. Par contre, les grandes entreprises du bâtiment recruteront sans doute de plus en plus des techniciens spécialisés amiante en interne plutôt que d’avoir constamment recours à des intervenants extérieurs.
Décret n°2017-899 du 9 mai 2017 – Repérage de l’amiante
Ordonnance n°2016-413 du 7 avril 2016 – Pouvoirs des agents de l’inspection du travail